• Visite et... travaux pratiques au coeur de l'atelier parisien de Pinel & Pinel, le plus rock and roll des malletiers. C'est dans une ancienne biscuiterie de 800 m2, située en plein Montmartre, que Fred Pinel, ex-publicitaire reconverti en malletier de génie a installé sa manufacture. Un lieu atypique, où l'on ne peut s'empêcher d'ouvrir des yeux gros comme des pièces de deux euros au fur et à mesure que l'on s'y aventure.

    Entre la malle Boudoir qui renferme un fauteuil capitonné et un porte-iPod (voir photo ci-dessus), en passant par l'écrin à vélo pliable ou la malle à bonzaï - avec arrosage intégré ! - entièrement gainée de cuir vert pomme et violet, nous sommes bien loin du malletier classique. Car la marque de fabrique de Pinel & Pinel, c'est de fabriquer des malles sur mesure et de la maroquinerie haute en couleur. Le tout, réalisé dans la plus pure tradition des métiers d'art, sans aucune limite et avec toujours une sacrée dose d'impertinence.

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    Depuis une dizaine d'années, le malletier bouscule les codes, à travers des créations contemporaines et colorées. Il distille son talent aussi bien auprès des particuliers que des grandes griffes. Il a notamment collaboré avec Bang & Olufsen pour la malle Soprano et a réalisé un kit picnic pour Krug. Sans oublier l'improbable "Just 23", imaginée pour contenir les 23 paires de baskets Nike Air de Michael Jordan.

    Peuplier

    Fred Pinel façonne avec ses 24 artisans parisiens des commandes spéciales, aussi luxueuses que décalées. Gainées de peaux exotiques déclinées dans des couleurs pop, les malles Pinel & Pinel sont aussi bien taillées dans du peuplier que réalisées avec de la fibre de carbone ou du titane pour les rendre plus légères et solides.

    L'artiste parle de son métier avec gourmandise. Cet éternel jovial vous accueille dans son antre et égrène avec nonchalance ses créations démentielles. Mais il va falloir mettre la main à la pâte. Et j'ai beau lui confesser que le bricolage ne figure pas sur mon CV dans la catégorie hobbies, il reste imperturbable. Et moi qui ne suis pas fichue d'accrocher un cadre à la maison... Du coup, il préfère m'épargner l'exercice périlleux de planter une centaine de clous dans une malle pour la renforcer.

    Hublot

    Heureusement que Fred Pinel est aussi un maroquinier talentueux... Ma mission du jour : réaliser de A à Z un Hublot, le porte-cartes bicolore emblématique de la maison. Percé d'un gros rond, il permet de faire sortir d'un simple coup de pouce ses cartes de crédit, visite, pass Navigo... et plus si affinités !

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    D'abord, je dois choisir les peaux dans lesquelles je vais tailler mon ouvrage. Fred Pinel s'approvisionne chez les plus grands fournisseurs de cuirs de luxe. Devant moi, des rouleaux de vachette, crocodile, autruche, lézard ou galuchat de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel me font de l'oeil. Je choisis finalement un croco-velours violet et du daim vert anis pour la doublure.
     
    Fred Pinel dispose sur mon établi une série de moules en métal qui correspondent aux dimensions des pièces nécessaires à la fabrication du porte-cartes en question. Je dois les positionner bien à cheval sur des écailles à peu près symétriques pour que les deux côtés de mon porte-cartes soient identiques. On m'apprend à me servir de la presse qui va me permettre de découper parfaitement les morceaux dont j'ai besoin. Vingt-quatre tonnes vont alors s'abattre sur mon emporte-pièce. Et il ne s'agit pas de laisser traîner ses doigts n'importe où. "Rester concentrée pour ne pas finir aux urgences...", me répétais-je comme un mantra.

    Poinçon

    Après avoir collé les pièces entre elles au pinceau, je dois les taper avec un marteau sur un bloc de granit pour chasser les bulles. Je repasse mon ébauche sous les 24 tonnes de la presse pour retailler les bords et rabote la tranche avec une meule. Vient ensuite la couture, un exercice périlleux, car effectué avec une machine industrielle qui se révèle assez difficile à maîtriser pour une néophyte comme moi. Monique, qui travaille dans la maroquinerie depuis 1970 et manie cette machine comme qui rigole, m'évite de torpiller tout mon travail en un clin d'oeil. Ensuite, je peins la tranche et laisse sécher mon Hublot.

    Dire que Fred Pinel est perfectionniste serait un doux euphémisme... Il observe mon ouvrage sous toutes les coutures et me fait un clin d'oeil. Signe qu'il est prêt à être embossé à chaud du poinçon de la maison. Ouf ! Contre toute attente, j'ai accompli ma mission.

    Il m'aura fallu une heure et demie pour réaliser ce simple porte-cartes dans les règles de l'art. De quoi prendre conscience que dans l'industrie du luxe, la fin justifie souvent les moyens.

    Boutique : 22 rue Royale 75008 Paris - www.pineletpinel.com

    Par laurent Doucet de Courtuy.


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