• Surtout connu pour ses rôles dans les séries TV, le comédien a incarné pendant 12 ans le docteur Alain Dulac, le macho hétéro du feuilleton de TF1, avant de faire son coming out en 2011.

    Stéphane Slima est mort. Il avait 41 ans. Pendant douze ans, l’acteur a incarné le docteur Alain Dulac, le macho manipulateur, "mec à femmes" de la série Sous le soleil. Le comédien est décédé ce week-end des suites d’un accident vasculaire cérébral alors qu’il était en vacances dans sa maison sur l’île de Ré.

    En avril 2011, Stéphane Slima avait fait coming out dans les pages du magazine Closer "pas pour se faire de la pub", mais pour être entendu selon ses termes. Il avait eu le déclic en visitant les locaux de l'association Le Refuge, qui recueille de jeunes homos en rupture familiale. Stéphane Slima refaisait ainsi parler de lui après des années de galère et de graves problèmes de santé, notamment une pneumonie qui l'avait plongé quatre jours dans le coma.
     
    Outre Sous le soleil, Stéphane Slima avait participé à de nombreuses séries télé : Extrême Limite, Julie Lescaut, Avocats et Associés ou encore Soeur Thérèse.com. L'acteur est également apparu dans plusieurs téléfilms de Josée Dayan, Jacques Audoir et Alain Tasma.
    Ancien membre de la Comédie Française, Stéphane Slima a également connu une carrière au théâtre. En 2002, il avait joué au côté de Michel Galabru dans Les affaires sont les affaires. Jacques Fabbri l'avait également engagé pour Le malade imaginaire en 1990.

    Au cinéma, Stéphane Slima avait joué sous la direction de Bertand Blier en 1992 dans 1, 2, 3 Soleil et en 2005 dans Combien tu m'aimes ?. En 1989, Jean-Paul Rappeneau lui avait confié l'un des rôles de son Cyrano de Bergerac.

    En octobre dernier, le comédien devait effectuer son grand retour sur les planches au côté de Nathalie Marquay-Pernaut dans une pièce intitulée Magouilles.net, finalement annulée au dernier moment. TÊTU avait rencontré l'acteur pour un long entretien zéro langue de bois. Voici l'intégralité de l'interview recueillie par Bertrand Deckers dans le numéro 171.

    TÊTU: Il y a quelques mois, tu choisis de révéler ton homosexualité. Tu n'as pas l'impression d'être resté longtemps dans le placard ?

    Stéphane Slima : Je ne me suis jamais senti enfermé. Je n'ai jamais caché ma sexualité. Je suis tombé amoureux, à 16 ans, d'un garçon beau comme un astre : Christophe. Il a bouleversé ma vie. Ce n'était pas que du sexe, c'était une vraie histoire d'amour. J'ai très vite su qui j'étais. Aucun déni de ma part ! Mes parents, mes amis, mes collègues...Tous étaient au courant. J'ai embrassé des dizaines de garçons en boîte, dans la rue... Mais je ne ressentais pas le besoin de l'annoncer officiellement. Je voulais attendre le bon moment, l'instant où mon message, mon acte servirait vraiment à quelque chose. Mon coming out - même si je n'aime pas ce terme, il ne me correspond pas vraiment - ne m'a libéré de rien ! Je l'étais déjà !

    Qu'est-ce qui a motivé ta décision alors ?

    Une visite au Refuge (association qui offre un hébergement d'urgence aux jeunes homos et aux victimes d'homophobie). J'en suis l'un des parrains aujourd'hui. J'ai été viscéralement malade de voir ces ados jetés à la porte, chassés de chez eux, parce qu'ils ont eu le courage de revendiquer, de vivre leur homosexualité. Je me suis dit que moi aussi je pouvais peut-être apporter ma pierre à l'édifice, engager ma notoriété si petite soit-elle dans une cause qui m'est chère. Mon message est simple : les gays ne sont pas que des folles tordues à paillettes. Arrêtons les préjugés ! Regardez, l'hétéro, l'homme à femmes, le macho, le fumier de Sous le soleil lui aussi "il en est" comme on dit ! Si ça peut faire réfléchir une mère, une grand-mère, un père de famille, alors... j'aurai tout gagné !

    Au fond maintenant, tu es presque militant...

    Je trouve qu'on est encore trop peu d'artistes à rompre le silence. A oser ! Il y a 40 ans, Simone de Beauvoir lançait son "manifeste des 343 salopes". Je lancerais bien, moi aussi, à mon tour, le "manifeste des 8, 9, 10 millions de pédés" ! Un appel sans aucune agressivité. Etre gay n'est pas un choix. S'il n'y a pas forcément de quoi être fier, il n'y a surtout pas de quoi en avoir honte ! Je suis de plus en plus convaincu que la meilleure arme est la visibilité !

    Pour tout monde, tu restes associé à Sous le soleil. Trois ans après l'interruption de la série, quels souvenirs gardes-tu de cette aventure ?

    Une expérience démente, un peu à l'américaine ! A la base, j'avais signé pour un contrat de 13 épisodes. La série a duré 13 ans ! Du jamais vu pour une fiction française ! On tournait 6 jours sur 7. Très vite, Tonya Kinzinger, Bénédicte Delmas, Adeline Blondieau... sont devenues de vraies amies. Sous le soleil était une seconde famille. Une "cohabitation" aussi longue crée forcément des liens très forts. Je me souviens de stress, de courses folles aussi. Je mettais un point d'honneur à continuer à jouer au théâtre, ma vraie passion. La journée j'étais à Saint-Tropez et le soir je me produisais à Paris ou en province. J'ai cru mourir mille fois !

    J’ai aussi vécu une véritable histoire d’amour avec

    un personnage masculin récurrent de Sous le soleil !

    Après l'interruption de la série, c'est un peu la descente aux enfers pour toi...

    Les mauvais coups se sont enchaînés, c'est vrai. J'étais comme emporté dans un tourbillon, une spirale sans fin. Depuis quelques temps déjà, je m'étais mis à boire. Un verre ou deux et puis un troisième, une bouteille, une deuxième bouteille... Fin 2008, suite à une opération dentaire qui me faisait souffrir le martyre, qui m'isolait socialement, professionnellement aussi, j'ai chopé un pneumocoque qui a provoqué un coma. J'y suis resté quatre jours. 4 jours et 4 nuits la tête traversée d'images. Des flashs ! Je m'en souviens encore parfaitement. J'avais l'impression d'être sur un tournage de Bertrand Blier. Au loin, en écho, j'entendais la voix de Tonya Kinzinger. Après le coma, s'en est suivi une pneumonie, une septicémie, une pleurésie... Je vous passe les détails ! Bref, j'ai frôlé la mort. On voit forcément la vie autrement après.

    Pour finir, avant que ta sexualité ne soit rendue publique, ton côté macho a dû te valoir quelques quiproquos ?

    Le nom de mon personnage déjà, Alain Dulac, est un "contrepet" follement drôle. Avec l'accent du sud, ça fait "à l'enculade". Qu'est-ce qu'on a pu rire avec ce jeu de mot ! Je n'étais pas le seul gay à tourner Sous le soleil. Au fil des saisons, on en a accueilli pas mal croyez-moi ! Je ne dis rien personne, je crois bien que certains vous lisent. J'ai aussi vécu une véritable histoire d'amour avec un personnage masculin récurrent de la série. Un rival en plus ! C'était des situations tellement cocasses... Mais je vous en ai déjà trop dit !

    Par David Chaumet.


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