• Dans un entretien accordé la veille de la Gay Pride au quotidien Le Parisien, la ministre déléguée à la Famille, Dominique Bertinotti, a annoncé que le gouvernement tiendrait ses engagements sur le mariage et l'adoption des couples homosexuels. Pour Christine Boutin, hostile à cette proposition, le mariage gay, plus qu'une question de société, est un enjeu de civilisation...

     

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    Atlantico : Dominique Bertinotti, la ministre déléguée à la famille, a annoncé ce vendredi veille de la Gay Pride que les couples homosexuels pourront se marier et adopter d'ici à la fin 2013. Est-ce illégitime que les couples du même sexe souhaitent avoir les mêmes droits que les hétérosexuels ?

    Christine Boutin : La question n'est pas là. Il faut entendre et écouter tous les désirs. C'est la responsabilité de l’Etat. En revanche, contenter tous les désirs peut s'avérer dangereux et tous n'ont pas à être contentés. Dans le cas contraire, ce serait le règne du plus fort au détriment du plus faible. Lorsqu'il y a des règles pour le code de la route et qu'on vous interdit de rouler à 250km/h, c'est parce qu'il y a des conséquences.

    Pourtant, plusieurs études démontrent que le fait d'avoir des parents homosexuels n'a aucun impact sur les enfants... 

    Lorsque j'affirme que si tous les désirs étaient satisfaits, on assisterait à la suprématie des plus forts sur les plus faibles, je pense bien sûr à la fragilité de l'enfant. Dans cette affaire là, on touche aux droits fondamentaux de l'enfant, comme celui d'avoir un papa et une maman. Mais cela va plus loin... Je suis pour ma part persuadée que le mariage et l'adoption pour les homosexuels sont une bombe à retardement. C'est la destruction de la société qui est en cause. C'est une question de civilisation. J'espère qu'il y aura à l'occasion du vote de ce texte un grand débat.

    Vous employez des mots forts... N'est-ce pas un peu disproportionné de parler de "destruction de la société" ?

    Cela fait 30 ans que je fais de la politique et que je m'intéresse aux sujets de société. Aujourd'hui, après les problèmes de bioéthique, de procréation artificielle, d'euthanasie, de mariage et d'adoption pour les homosexuels, la seule vraie question importante et exaltante qui nous est posée est : quel est l'homme que nous voulons pour demain ? "Est-ce un homme qui tient compte de la réalité ?
    Si l'on revient au mariage et à l'adoption homosexuel, un enfant ne peut être conçu que par une relation féminine et masculine, je dirai même par une cellule féminine et masculine. On pourra prendre tous les artifices que l'on veut, même dans une éprouvette, même dans un utérus artificiel, la naissance d'un enfant, c'est toujours la rencontre d'une cellule féminine et masculine. On est en train de jouer avec le réel ; ce qu'on est en train de faire, c'est un détournement de l'écologie humaine. Nous sommes tous nés d'un homme et d'une femme. Cette idée d'homoparentalité renonce au premier présupposé de l'écologie humaine.

    Mais il s'agit d'un débat sur l'adoption et non sur la procréation ?

    Les enfants sont toujours le résultat d'un papa et d'une maman : d'un spermatozoïde et d'un ovule. C'est la manipulation du réel qui est en jeu dans cette affaire. Veut-on laisser le cycle naturel de l'évolution de l'homme se faire ou veut-on jouer avec le réel ?

     

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    Rachid Dati a déclaré ce vendredi : "On n'a jamais dit non au mariage homosexuel. Il ne faut pas nous prendre pour des réac." Défendez-vous des positions "réac" ? 

    Pour moi, les "réac" sont ceux qui défendent l'homoparentalité. Il y a une parole très forte de Winston Churchill, qui distingue l'homme politique de l'homme d'Etat. L'homme politique regarde les conséquences de ses actes en fonction des conséquences immédiates et du résultat des élections. L'homme d’Etat regarde les conséquences de ses décisions pour les générations à venir. Je suis "un homme d’État".

    63 % des Français souhaitent que le mariage entre personnes de même sexe devienne un droit, selon un sondage BVA/Le Parisien, daté de janvier 2012. Ne craignez-vous pas d’être déconnectée de la société ?

    Je pense que lorsque l'on pose une question aux Français sans avoir organisé un débat au préalable sur les conséquences d'une pareille décision, ces derniers laissent parler leur générosité. Moi aussi, je n'aime pas voir les gens souffrir. Je comprends que par affectif, par sensibilité ou par souci de l'autre, les Français puissent répondre oui.
    Sur la bioéthique, on a bien vu qu'à partir du moment où il y a eu un débat en profondeur, bien mené par l’Etat et la religion catholique, les positions des Français ont beaucoup évoluées dans le sens de plus de responsabilité quant à l'avenir. Je souhaite un véritable débat dépassionné sur ce sujet.

    En 1999, vous aviez voté contre le PACS. Aujourd’hui feriez-vous de même ?

    Bien sûr. On pouvait très bien rétablir des droits qui n'existaient pas pour les homosexuels, par exemple sur la sécurité sociale, ou sur les droits de succession, sans pour autant créer un statut. Dès lors que l'on créait un statut, on allait inévitablement vers le mariage homosexuel. C'est une logique juridique. J'étais favorable à l'égalité de droit, mais sans un statut juridique particulier qui était la porte ouverte au mariage et à l'adoption.  

    L’annonce de Dominique Bertinotti intervient la veille de la Gay Pride. S’agit-il, selon vous, d’une opération de communication ?

    C'est une opportunité d'actualité. Je comprend que Dominique Bertinotti, le ministre de la famille chargée de faire appliquer le programme de François Hollande, s'en saisisse pour faire parler d'elle.

    Ce vendredi, vous avez tweeté : «Le mariage gay pour bientôt ? On cache comme on peut la réduction du nombre de fonctionnaires et autre rigueur.»  Les questions de société sont-elles pour le PS une manière d’éluder la question sociale ?

    Il est assez légitime de se poser la question...

    On notera dans cette interview réalisée par nos confrères d'Atlantico que nulle part Madame Boutin ne parle d'amour, de couples de mêmes sexes qui partagent leurs vies et désirent fonder une famille... pour elle la famille reste un père, une mère et des enfants, mais que dire des autres cas de figures comme les familles monoparentales, recomposées etc. Sans oublier que son nouvel argument est la bioéthique ! Il serait intéressant de l'interroger sur les personnes qui naissent hermaphrodites par exemple ?

    Par Olivier de Cléry - interview Atlantico


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